Résumé :
L’anémie est le motif le plus fréquent des
consultations des malades aux urgences, pouvant rentrer dans le cadre de plusieurs pathologies, ce qui la rend un symptôme et non pas une maladie où la recherche étiologique s’impose.
La compréhension des mécanismes physiopathologiques de l’anémie permettent d’aboutir au diagnostic et de proposer le traitement adéquat.
L’infirmier joue un rôle primordial dans la prise en charge des malades atteints d’anémie ; par son contact étroit avec le malade il participe par la bonne application des thérapeutiques à celui-ci et son éducation aux soins.
Mots clés : anémie, signes fonctionnels de l’anémie, hémogramme, transfusion sanguine, relation infirmier/malade, éducation aux soins.
Ce qu’il faut connaitre sur l’anémie :
Généralités :
Définition :
L’anémie se définit par la diminution de la quantité d’hémoglobine totale, <13g/dl chez l’homme et <11g/dl chez la femme.
Elle est secondaire à une hémorragie, une hémolyse ou une diminution de la production de globules rouges (GR).
Rappel physiologique
La moelle osseuse fabrique les cellules rouges. Le processus s’appelle l’hématopoïèse.
La durée de vie des GR est normalement de 90 à 120 jours. 1% des GR circulant sont détruits par jour et remplacés par la moelle en même quantité on l’appelle : Hémolyse physiologique.
Mécanismes de l’anémie
A) Insuffisance de production d’hématies
- Par hypoplasie médullaire ou dysplasie
- Insuffisance de synthèse de l’hémoglobine
– Carence en fer, en certaines vitamines.
B) Hémolyse importante non compensée :
– La moelle n’est plus capable de compenser la destruction des GR.
– Peut être corpusculaire (anomalie d’un constituant du GR : membrane, hémoglobine, système enzymatique interne) ou extra corpusculaire (Anti corps dirigés contre le GR, anomalie valvulaire tel un rétrécissement aortique (RAO) entrainant la destruction des GR lors de leur passage).
C) Pertes excessives :
– Sous forme d’une hémorragie : saignement extériorisé ou non digestif , gynécologique, urinaire ,ORL …
D) Inflammation :
– lors des syndromes infectieux , états inflammatoires par détournement du fer vers le site inflammatoire .
Clinique
Signes fonctionnels :
- Pâleur cutanée et muqueuse
- Vertiges, acouphènes (bourdonnement des oreilles ),asthénie
- Dyspnée d’effort ,voire même de repos .
Certains signes sont spécifiques et peuvent orienter vers la cause de l’anémie :
- Pâleur avec ictère : anémie hémolytique
- Koïlonychie : anémie ferriprive
- Stomatite angulaire (perlèches) anémie ferriprive
- Splénomégalie : hémolyse, syndrome myélo- ou lymphoprolifératif ,Drépanocytose , thalassémie .
- Neuropathie : déficit en vit. B12 ou acide folique
- Signes digestifs : diarrhée ;constipation , douleur gastrique ,Glossite (langue sèche ,grosse ,lisse ) : déficit en 12 .
- Douleurs osseuses : drépanocytose
- Déformation cranio faciale ,retard de croissance staturo -pondéral : thalassémie.
Examens complémentaires
L’hémogramme : FNS :
L’examen clé pour confirmer le diagnostic de l’anémie les paramètres à observer sont :
– Le nombre de GR , Le taux d’Hb (hémoglobine) , le taux d’hématocrite (Hte): pour confirmer l’anémie
– VGM (volume globulaire moyen) : pour préciser le caractère microcytaire, macrocytaire ou normocytaire.
– CCMH (concentration corpusculaire moyenne en Hb) pour préciser la coloration des GR : normochrome ou hypochrome (pâle)
– Le frottis sanguin confirme les données de l’hémogramme : la forme des GR ,leur taille et leur coloration .
Coloration des réticulocytes
– La mesure du taux de réticulocyte permet de préciser le mécanisme de l’anémie.
=>si le taux de réticulocyte (Rétic) est élevé on parle d’une anémie régénérative (la moelle produit beaucoup) et donc la cause est périphérique.
=> si le taux de réticulocytes (Rétic) est bas on parle d’une anémie arégénérative (la moelle ne produit pas) et la cause est dite centrale .
Myélogramme :
– ponction de moelle osseuse en cas d’anémie d’origine centrale : anémie par carence en B12 ou en acide folinique
Autres bilans :
– Si suspicion d’anémie ferriprive : Fer sérique, la ferritine (réserves en fer), la transferrine, calcul de la saturation en fer.
– Si suspicion d’anémie mégaloblastique ( par carence en facteur anti pernicieux ) : Dosage vitaminique : de la vitamine B12 ,et B9 (folates).
– Si suspicion d’anémie congénitale (drépanocytose, thalassémie): Electrophorèse de l’HB , Test de falciformation :drépanocytose , dosage de l’enzyme G6PD : favisme (hémolyse par ingestion de fève ).
– Si suspicion d’une anémie inflammatoire :VS .
Classification : [1]
Figure 1 Classification des anémies selon le mécanisme
Tableau 1 Classification biologique des anémies
CLASSICATION BIOLOGIQUE DES ANEMIES
CLASSICATION BIOLOGIQUE DES ANEMIES |
|||
MICROCYTAIRE
VGM<80 flt |
NORMOCYTAIRE
VGM :80-95 flt |
MACROCYTAIRE
VGM>95 flt |
|
Arégénérative Taux de Rétic <120000 |
– Carence en fer – Inflammatoire – Beta thalassémie mineure |
– Aplasie – Infiltration médullaire par un cancer solide ou hémopathie |
– Carence en B12 , B9
– Syndrome myélodysplasique – Dysthroidie – Insuffisance rénale – Hépatopathie |
Régénérative
Taux de Rétic >120 000 |
– Les syndromes thalassémiques majeurs – Drépanocytose S/B thalassémie
|
– Hémorragie aigue
– Hémolyse aigue ou chronique |
– Drépanocytose homozygote
– Anémie hémolytique auto-immune |
Traitement
Le traitement est symptomatique et étiologique de la cause sous-jacente .
Traitement symptomatique : pour soulager le malade, consiste à :
- Mettre au repos le malade avec une oxygénothérapie.
- La Transfusion sanguine par des culots globulaires iso groupes iso rhésus phénotypés, si l’anémie est mal tolérée ou si elle est congénitale : Beta thalassémie.
- Apport de la vitamine B12 ou de folate en cas de carence vitaminique .
- Apport en fer en per os ou injectable : fumafer, ferrosanol si anémie ferriprive .
- Facteurs de l’érythropoïèse en sous-cutané : Eprex, Néorecormon, Aranesp si syndrome myélodysplasique ou cause rénale .
Traitement étiologique :
- Lutte contre un syndrome inflammatoire
- Elimination d’une cause locale de saignement chronique : ulcère gastrique, règles trop abondantes chez une femme.
Conseil génétique :
- En cas d’anémie hémolytique congénitale : dépistage des porteurs sains et sensibilisation des parents .
Ce qu’il faut retenir :
Rôle de l’infirmier dans la prise en charge : [2]
Repérer les symptômes de l’anémie chez le patient
Les patients sont hospitalisés en cas d’anémie sévère ou associée à une pathologie.
- Repérer les signes de l’anémie et les communiquer au médecin :
– A l’accueil : évaluer l’état général du malade, assistance avec une tierce personne.
– Les signes de l’anémie à rechercher : pâleur, vertiges, bourdonnement des oreilles ,dyspnée d’effort ou de repos ,céphalées .
– Evaluer le besoin d’oxygène , et le degré de fatigue .
– Installer le patient .
– Prendre le pouls, la PA ; la FR
– Vérifier la carte de groupage
- Transmettre les données au médecin surtout s’il y’a aggravation des signes.
Participer au diagnostic
– Récupérer la FNS( formule et numération sanguine ), GS (groupage sanguin) : 2e détermination.
– Dépister les signes cliniques de l’hémolyse, l’aspect des urines.
– Prévoir en fonction du taux d’Hb une transfusion sanguine.
Appliquer et surveiller les thérapeutiques :
- Une prescription médicale sera faite soit une transfusion sanguine, soit un traitement oral ou injectable.
Produits sanguins: Transfuser en tenant compte des mesures de sécurité :
- S’assurer de la présence du médecin.
- Vérifier l’intégrité et l’aspect de la poche ,la date de péremption ,le numéro de la poche ,le groupage ,le test de compatibilité qui l’accompagne .
- Effectuer l’ultime contrôle pré transfusionnel au lit du malade.
- Prendre les constantes du malade FC(fréquence cardiaque ),PA( pression arterielle , T° (température) .
- Poser la transfusion et surveiller surtout les premières gouttes, si réaction au sang, arrêter la transfusion et appeler le médecin.
Traitement médical :
comprimés, injections.
– Vérifier la prise médicamenteuse, l’observance, surveillance de l’efficacité du traitement.
– Déceler les effets secondaires : selles noires, constipation (fer), douleur aux points d’injections et rassurer le patient.
– Surveiller l’amélioration des signes cliniques.
– Un bilan sanguin régulier est refait après le traitement ou la transfusion.
Soins éducatifs
– Expliquer au patient les raisons de sa fatigue : la diminution de l’Hb .
– Incapacité à effectuer ses soins d’hygiène : est liée au manque de force et risque de tomber sa fatigue
– Lui demander de ne pas se lever brutalement :
– s’asseoir sur le bord du lit avant de se lever : l’hypotension est provoquée par l’anémie.
– de regarder devant soi et non pas au sol puis se lever gardant l’appui et demander de l’aide au besoin.
– Si malade mis sous fer recommander une alimentation riche en vitamine C et fibres et de ne pas boire du thé car ça diminue l’absorption du fer
Conclusion
Le rôle de l’infirmier est très important dans la prise en charge des malades atteints d’anémies par la bonne application du traitement et l’éducation du patient. Le contact fréquent avec le malade permet d’établir une relation malade/infirmier très solide permettant une meilleure prise en charge.
Références :
- Celi, J., et al., Anémie ferriprive, inflammatoire ou mixte: comment orienter le diagnostic? Revue médicale suisse, 2011(313): p. 2018.
- soins infirmiers aux anémies [cited 2003 19/11/2003]; Available from: http://www.infirmiers.com/etud/courslibre/courslibre.php.