Enjeux de l’écriture dans la formation aux sciences paramédicales

Les documentalistes du SIDOC ont récemment organisé un colloque dédié à

CarolineTête, ChristinePaillard Sidoc

l’écriture soignante en terre algérienne. Le plateau d’orateurs proposés lors de cet événement a permis à l’assistance de mieux appréhender les modes de rédaction des textes scientifiques, professionnels, voire poétiques. Nous avons également eu l’opportunité de faire un retour d’expérience sur ce thème.


Les documentalistes du SIDOC (Sciences infirmières documentation) (http://sidoc.fr/) ont organisé un colloque le 11 mai 2016 à La Cité de la santé pour évoquer la littérature en soins infirmiers.

Celui-ci a rencontré un vif succès en terre africaine, si bien que nous avons renouvelé l’expérience le 3 avril 2017 à l’Institut national pédagogique de la formation paramédicale d’Alger.

Écrire, souvent une contrainte pour un paramédical
D’après Ferdinand Buisson [1], “Pour être lu, il faut écrire avec netteté, comme pour être entendu, il faut parler avec clarté…”.

Ecrire dans le domaine paramédical relève souvent de la contrainte. Du mémoire de fin d’études à la thèse, il y a la méthodologie, les dates à respecter, les fautes à corriger, les synonymes à trouver, travailler sous le regard d’un pair et l’espérance d’une note positive.

Les contraintes éditoriales sont nombreuses mais ne sont pas négatives au regard des intentions pédagogiques. La motivation devient ici un outil de réflexion invitant l’apprenant à poursuivre un but réalisable.

Être obligé d’écrire pour valider un parcours professionnalisant, c’est être obligé de “bien faire” et donc relève du véritable bénéfice, au sens premier du terme [2].

Écrire, c’est aussi sortir de l’isolement, s’émanciper de l’ignorance, c’est faciliter une transformation sociale, c’est la première chaîne vers l’acquisition des connaissances, du soi vers les autres. II en résulte la nécessité de l’entraînement technique indispensable pour une meilleure adaptation de l’apprenant, dans sa réalité professionnelle [3]. Cette journée porte sur les différents aspects de l’écriture dans le champ paramédical Il est question de poésie, de vulgarisation scientifique, d’écriture dite sensible, de rédiger des articles ou des mémoires professionnels et enfin, de savoir rédiger sur le Web.
Une session dédiée aux articles professionnels

Idriss Farota Romejko, infirmier en soins palliatifs, membre du comité de lecture à la revue de l’infirmière, a communiqué sur Les articles professionnels. Écrire pour une infirmière en Algérie ou en France est une question : sur quoi écrire, comment écrire, pour qui écrire ? Cette rencontre franco-algérienne met en lumière le fait que les infirmières ont encore aujourd’hui un complexe à écrire et que ce complexe est d’autant plus important lorsque la langue de l’écriture n’est pas la langue maternelle (anglais pour les français et français pour les algériens).

M. Ahmed Mebarki, médecin auxiliaire dans les années 1980, puis enseignant et écrivain est doctorant en littérature, a évoqué La santé et la poésie : quand la poésie rime avec science. Ce colloque dédié à l’écriture devrait s’ouvrir sur les autres écritures porteuses de connaissances et de savoirs fondateurs de civilisations et de cultures fécondes ou perfectibles et tolérantes basées sur l’altérité ou le respect de l’autre…

La caractéristique impersonnelle de l’écriture scientifique
M. Abdelhamid Zaïdi, médecin à la retraite, enseignant et écrivain, a parlé de L’écriture et la vulgarisation scientifique. L’écriture scientifique se caractérise par une langue dite “froide”, “neutre”, “dénuée de sentiments” et de “superlatifs”. C’est aussi autrement dit, l’ensemble des actions qui permettent au public d’accéder à la culture au sens large. Le style de l’écriture scientifique doit être “impersonnel”. La vulgarisation scientifique est une forme de diffusion pédagogique des connaissances qui consiste à mettre le savoir à la portée d’un public non expert…

M. Djamal IFTICENE, responsable du centre de documentation à Tizi Ouzou, a communiqué sur L’accompagnement des étudiants infirmiers dans l’élaboration de leurs travaux personnels et de leurs mémoires professionnels. Il est question ici d’accéder plus facilement aux ressources documentaires disponibles en fonction du thème à traiter en lien avec un accompagnement didactique. Le centre de documentation doit comporter des informations fiables pour répondre aux besoins réels des étudiants. L’accompagnement des étudiants est l’apanage du documentaliste qui doit mettre toutes ses compétences et son expérience à la disposition des usagers en quête d’informations pertinentes.

Notre expérience de l’écriture soignante
Christine Paillard, Présidente du Sidoc, membre du comité de rédaction IZEOS, a partagé son expérience de rédactrice avec L’écriture sur le Web. Écrire sur le Web implique de nouvelles contraintes, comme l’utilisation du multimédia. Rédiger des articles pour IZEOS (infirmiers.com ou cadredesante.com) demande le respect d’une politique éditoriale bien rodée, au regard des contraintes techniques, langagières, humaines. L’article est conçu dans une perspective collaborative, hypertextuelle. Les titres et intertitres interviennent dans la logique de référencement, le choix des mots renvoie donc aux statistiques…

Caroline Tête est documentaliste au Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie en France. Elle a échangé autour des écritures soignantes en soins palliatifs. Écrire en soins palliatifs permet de laisser une trace, c’est le cas de l’écriture fonctionnelle qui retrace les faits et actes effectués sur le patient ou de l’écriture prescriptive qui formalise les décisions du médecin. Écrire permet aussi aux soignants de transmettre des connaissances et des savoirs : l’écriture scientifique en est un bon exemple. Elle met à disposition des pairs les résultats de la recherche ou une réflexion relative à la pratique professionnelle. Enfin, écrire, c’est aussi se décharger de la tension émotionnelle inhérente à la pratique des soins palliatifs. L’écriture créative et sensible, fictionnelle mais inspirée de l’expérience professionnelle, reflète la réalité des soignants et des patients. Elle autorise le soignant à prendre du recul vis-à-vis de sa pratique et à témoigner de ses propres émotions.
Une table ronde pour conclure

Tous les intervenants se sont enfin réunis autour de la journaliste Khadija Chouit, directrice de la revue socio-culturelle Esprit bavard, pour évoquer les difficultés de publication en Algérie. Les enseignants, des directeurs d’instituts, des professionnels en santé et des documentalistes ont échangé autour des contraintes éditoriales mais aussi sur l’accompagnement des étudiants pour décrire une pratique soignante dans un bassin linguistique complexe (apprentissages en langue arabe et mémoire en langue française). Il a été question des compétences des soignants qu’ils peuvent valoriser en créant une communauté de rédacteurs sur Internet. Le Web semble être l’espace le plus approprié (blogs, site…) pour partager des expériences.

Des projets ont été lancé à la fin du colloque. Le Professeur Bah Keita, représentant de l’OMS, a évoqué des publications possibles avec l’OMS et Morad Yahia Cherif, directeur de l’institut national pédagogique de la formation paramédicale d’Alger, a proposé aux personnes intéressées de redynamiser la publication de la revue Savoirs et compétences.

La possibilité de créer un comité de lecture propre à l’institut a également émergée afin d’offrir une assistance aux soignants algériens qui se lanceront dans l’écriture. Pour le Sidoc, cette journée fait écho à la formation réalisée pour les documentalistes des instituts paramédicaux en Algérie visant la démarche qualité des centres de ressources dans les institut paramédicaux.

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